Bouchées à la reine, soupe aux truffes, tournedos Rossini, blanquette de veau, Coq au vin… Si cette liste de délices vous met l’eau à la bouche, c’est que l’art culinaire français n’a pas volé sa réputation mondiale. Raffiné, créatif, varié, régionalisé même, son histoire est intimement liée à celle de la France.
Une tradition séculaire sans cesse perfectionnée
La cuisine française est issue d’une longue tradition héritée à la fois des romains et des gaulois. Elle s’est perfectionnée dans les cours royales du Moyen-âge avec la tradition des grands banquets et la recherche d’associations de produits toujours plus sophistiquées. On cultive alors aussi les « simples », ses herbes variées connus de toutes les abbayes et monastère. Elles sont reproduites, d’abord, pour leurs vertus médicinales mais certaines ne manquent pas de relief et de saveurs et on peut les utiliser comme condiment. A cela, il faut ajouter que le climat tempéré et clément offrait déjà de belles variétés de produits à combiner.
Plus tard, à l’époque des grandes découvertes, les bateaux rentraient dans les ports de France avec des trésors gastronomiques dans leurs cales : épices, fruits, légumes, aromates, victuailles… Curieux de tout, les chef français les ont testés puis adoptés dans leurs différents mets. Certains de ces aliments importés sont devenus des incontournables en cuisine française : cacao, café, thé, pomme de terre, haricot, tomates, dindon… Les saveurs des plats sont rehaussées, de bons parfums ragoutants les accompagnent.
Des restaurants à la grande médiatisation
Les restaurants sont apparus avec l’avènement de la Révolution française du XVIIe siècle. Le concept fut un succès monumental et le secteur de la restauration fut très vite réglementé avec l’avènement des critiques gastronomiques.
Au début du XXe, la haute gastronomie française a traversé les océans avec Joseph Favre, un talentueux chef cuisinier suisse, fondateur de l’Académie culinaire de France. Ce passionné de mets savoureux et de diététique culinaire a fait connaître la cuisine française en Europe, en Angleterre et aux États-Unis. Plus tard, dans ce même XXe siècle, des chefs comme Raymond Oliver porteront la cuisine française sur le petit écran et les grands cuisiniers se mettront à s’afficher et à voyager.
Toujours au même siècle, la gastronomie inspirera même le monde cinématographique. Sans parler du très international « Ratatouille », des titres cultes comme « La cuisine au beurre » avec Fernandel et Bourvil, ou plus tard, « le grand restaurant » et « l’Aile ou la cuisse » avec Louis de Funès la porteront aux nues. Bien sûr la cuisine française aura aussi ses bibles. Plus ménagères et simples au départ, elles se multiplieront dans toutes les direction avec la médiatisation de la cuisine et le goût du public pour les fourneaux. Les grands chefs créeront bien souvent les leurs.
Lancement de la course aux étoiles
Depuis le XXe siècle, les fins Gourmets ont aussi leurs guides. La nouvelle cuisine et la nouvelle gastronomie ont fait des émules. Ils ne suffit plus de bien manger, il faut qu’un plat soit un véritable voyage : dans l’enfance, dans l’espace, dans l’expérience, dans l’émotion. Les amateurs au palais délicat sont orientés vers les meilleurs établissements de France par le fameux Guide Michelin ou encore le Gaut&Millau. La course aux étoiles est lancée. Certains la paieront chers : le rêve d’étoiles coûte cher. Beaucoup d’investissements, beaucoup de pression pour se maintenir au sommet. Oui mais quand l’étoile s’en va comment maintenir la rentabilité sans l’appui de celui qui vous avait fait ? Alors, on en revient un peu. On pense à Bernard Loiseau, et plus près de nous encore, au coup de gueule de Marc Veyrat. Malgré tout cela, elle reste pour de nombreux chefs, une panacée et rares sont ceux qui boudent son obtention.
Aujourd’hui, Internet gagne aussi des parts de marché et veut avoir son mot à dire. C’est un peu la foire d’empoigne. Avis gastronomiques, critiques, recettes maison, recettes de chefs réalisées à la maison, photographie de « réalisations », blogs, Instagram, chaînes youtube à tous les étages. Dans cette chasse au follower, on trouve de tout : de l’amateur sans expérience à la ménagère jusqu’aux chefs, du bloggeur critique gastronomique sortie de chez Flunch aux palais ayant fait leurs armes.
Les sites d’opinions et d’avis
On trouve aussi quantité de sites qui permettent d’avoir l’avis du consommateur et des internautes. Pour les restaurateurs qui pouvaient trouver un peu injustes les critiques gastronomiques professionnelles d’antan, le problème est multiplié par 10. Ici, comme sur les réseaux sociaux, des nombreuses personnes veulent donner leur avis :
« — Nous sommes arrivés à 14h30. Les frites de Pitchoune étaient pas très chaudes. La ratatouille de Michel manquait de sel et il n’y en avait pas sur table (du sel). Service bof, la serveuse souriante mais bof. Le reste ça allait mais bon pour 8,30 euro par personne on pouvait s’attendre à mieux. Déçue. 1 étoile« .
Pas de deuxième chance, pas de discussion sur place. Comment donner des sueurs froides à un restaurateur exposé sur un site web sur lequel il n’a même pas demandé à être ? Nous forçons un peu le trait. Sur les tendances et quand les avis sont nombreux ce genre de sites web permet de se faire une idée. On arguera aussi qu’ils permettent sans doute à de nombreux restaurateurs ou qui en ont l’ambition de se perfectionner. Mais, tout de même, on sait bien qu’un critique négative, même postée injustement peut dissuader 10 ou 15 futurs clients potentiels de tenter l’expérience. Au jeu de « je donne mon avis sur tout et à tout propos« , l’expérience a montré que les internautes ne semblent pas désireux de modérer eux-mêmes. « J’aime pas Victor Hugo« , « J’y connais rien en art mais je trouve ça moche », « Van gogh c’est pourri« , « j’ai pas lu ce livre mais ça a l’air chiant. »
La cuisine française patrimoine culturel de l’humanité
Pour le reste, la gastronomie française est inscrite en tant que patrimoine culturel immatériel de l’humanité à l’UNESCO en 2010. Un bon plat c’est une image, un parfum, une texture, une saveur. Les recettes à la française sont réalisées grâce au talent et à la créativité du cuisinier. Une fois consignées, elles deviennent des références à remanier pour les futurs créateurs de mets délicieux.
La cuisine française est un art, une vocation, un domaine d’étude. Elle possède son vocabulaire propre consignée dans des encyclopédies comme le Larousse gastronomique. Les recettes des bons petits plats sont recueillies dans des ouvrages spécifiques pour ne citer que le fameux Répertoire de la Cuisine. Pour ce qui est des livres, revues, nous l’avons dit. L’embarras du choix est laissé au consommateur. Leur nombre impressionnant a rendu nécessaire une catégorisation des créations en apéritif, salade, plat de résistance, dessert, digestif, viennoiserie, pâtisserie, etc.
Science, cuisine et ustensiles
Dans une certaine mesure, la cuisine française a aussi évolué avec le développement de la science : meilleure connaissance des grilles diététiques, meilleure conscience du gaspillage et meilleure gestion des économats. Elle s’est modernisée au fil du temps. La gastronomie moléculaire, inventée depuis 1988, illustre ce phénomène même si elle est loin d’avoir supplanté l’autre gastronomie qui n’y fait pas appel. Avec ces techniques, tout est paramétré au millimètre : le temps de cuisson, les composants des ingrédients, réaction chimique, destructuration des produits sous les formes les plus inimaginables. On recherche la nouveauté et le ludique.
Des chefs comme Ferran Adrià en Catalogne, Thierry Marx en France et d’autres encore ont su sublimer cette cuisine. La bonne ménagère et un grand nombre de chefs n’y ont toutefois, toujours pas souscrits. Pas besoin d’être un scientifique pour faire un bon cuisinier. Nul ne le prétend, ni même les virtuoses de la cuisine moléculaire. Il faut un palais, des techniques bien rodés, le sens des temps de cuisson, une bonne créativité pour les associations et par dessus tout, du métier et de la pratique. De la même façon, on pourra vous dire que l’évolution de la gastronomie implique l’utilisation de nombreux ustensiles de cuisine : fourchette, poêle, four, marmites, cloches, couteaux, robot pour ci, robot pour ça, etc. Le marketing tend à les multiplier, mais il ne faut pas se laisser décourager : les grands chefs vous diront que cuisiner commence avec au moins un bon couteau, une bonne casserole ou un bon caquelon avec un bon fond et une poêle. Et plus que des tonnes d’ustensiles, il faut aussi des bons produits.